Depuis quelques semaines, les sujets autour de la violence physique ou sexuelle sont au cœur des discussions dans les médias. C’est le résultat de la succession de dénonciation de viols sur les réseaux sociaux. Dans cette sensibilisation contre les violences basées sur le genre, plusieurs associations s’efforcent d’attirer l’attention sur une toute autre forme de violence : la violence économique au sein du couple. Estelle Amad, Secrétaire Générale du Conseil National des Femmes de Madagascar tire la sonnette d’alarme.
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« La violence économique c’est refuser que sa partenaire soit autonome financièrement »
Plusieurs personnes ne s’en rendent pas compte, mais le fait de refuser que sa partenaire puisse gagner de l’argent par elle-même est une forme de violence explique Estelle Amad. C’est restreindre les libertés de la personne pour qu’elle dépende entièrement de soi. Dans un couple, c’est généralement l’homme qui exerce cette forme de violence. Il refuse que sa conjointe aille travailler en dehors du ménage. Il ne lui permet pas d’accéder aux études nécessaires pour décrocher l’emploi dont elle rêve. En parallèle à cela, il ne lui donne pas l’argent nécessaire pour répondre à ses besoins les plus basiques. Sans oublier les attaques verbales : « Tu ne sers à rien dans cette maison », « ce n’est pas toi qui te fatigues tous les jours pour gagner cet argent donc économise bien », etc.
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Reproduire un stéréotype
Selon Estelle Amad, l’origine de cette violence économique au sein du ménage se trouve dans les traditions malgaches. En effet, dès son enfance, la société inculque dans la tête de l’homme que c’est lui le chef de famille. Donc, c’est à lui de pourvoir aux besoins de celle-ci. La femme, elle, doit rester à la maison pour s’occuper du ménage et des enfants. En grandissant, l’enfant va vouloir reproduire ce schéma. Laisser sa conjointe gagner de l’argent par elle-même risquerait de diminuer son pouvoir et lui faire perdre son statut de « chef ». Pour garder « le contrôle » sur sa conjointe et sa famille, il pense devoir mettre en exergue cette domination économique.
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Éduquer pour équilibrer
« A cause de cette violence économique, plusieurs femmes pensent qu’elles ne sont capables de rien sans leur conjoint. Elles perdent leur estime d’elle-même », indique-t-elle. En plus de cela, le fait de toujours rester à la maison prive ces femmes d’une vie sociale nécessaire pour leur épanouissement. Estelle Amad va même plus loin en disant que cela porte atteinte à la dignité humaine des victimes, incapables de répondre elles-mêmes à leurs besoins les plus basiques. Pour remédier à cela, il faut déconstruire les idées reçues. Apprendre à chacun, dès l’enfance, l’importance d’être autonome financièrement, qu’il s’agisse d’une femme ou d’un homme. Il faudrait également mettre en valeur les avantages de l’autonomie financière, affirme-t-elle. Cela devrait même être introduit dans le programme scolaire. Il faudrait également sensibiliser les filles pour qu’elles exploitent leur plein potentiel et faire comprendre aux garçons que le ménage n’est pas une question de pouvoir mais d’entraide.
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