Avec la deuxième vague, plus meurtrière, de la pandémie de Covid-19, les décès s’accumulent à Madagascar. Nombreux sont déclarés comme ayant succombés à une mort de raison naturelle ou d’autres raisons. Une grande majorité des Malgaches préfère éviter d’évoquer le fait que leur proche est mort de la Covid-19.
Des avis de décès sur les réseaux sociaux, sur les tableaux d’affichages des Fokontany ou des églises. Chaque jour, sur Facebook, une personne trouve au moins un avis de décès en déroulant le fil d’actualité de son compte. Ce qui est pourtant surprenant, c’est le fait que peu osent affirmer que leur proche soit mort de la Covid-19. Pour certains, c’est dû au fait qu’ils ont peur d’être rejetés par la société, par la famille ou par les amis.
La peur d’être rejeté, écarté par la société
« Avec la psychose qu’a engendré la Covid-19, entendre qu’une personne du voisinage est tombée à cause de cette maladie entraînerait une vague de peur dans la société. A cause de cela, les gens auront tendance à prendre de la distance par rapport à la famille qui vient de perdre un proche », explique la psychologue Ashley Razafindrabe. Selon elle, c’est ce qui expliquerait que la famille d’un défunt préfère se garder de dire que leur proche est mort de Covid-19.
« En fait, pour notre cas, quand notre père a trépassé, ce n’est pas que nous avions eu honte de dire qu’il est mort de la Covid-19. C’est plus que nous n’aimerions pas que dans le voisinage on ne parle que de lui ou de nous », explique Sandy. « C’est tout à fait normal que les gens parlent de cette maladie, parce que tout le monde en a peur. Mais être au cœur de leur discussion parce que soi-disant notre père est mort de cette maladie, c’est attristant », souligne-t-elle.
Le sentiment de non accomplissement pour les vivants
Par ailleurs, avec les mesures par rapport à la pandémie, les rituels qui doivent se faire à la mort d’une personne sont limités. C’est le cas notamment pour les veillées, présentations de condoléances ou encore les obsèques. « Pour la famille du défunt, cela crée quelque part le sentiment de non accomplissement des devoirs envers le défunt », explique la psychologue. S'ajoute à cela la honte aux yeux de la société de ne pas avoir pu sauver leur proche, ce qui est encore plus blessant.
« C’est quand même affligeant et triste quand la société nous pointe du doigt », explique Sandy. « Déjà que nous n’avions même pas pu faire notre deuil à cause des mesures, leur comportement nous accuse dans un sens de ne pas avoir trouvé le moyen de faire le nécessaire pour notre père », ajoute-t-elle.