Une femme peut-elle réussir sans coucher ? La question peut sembler déplacée mais devant la pression que subissent plusieurs femmes dans leur milieu professionnel, il convient de rappeler que oui, une femme peut réussir d’elle-même. Â
Quand la volonté d’émancipation des femmes se heurte à la misogynie viscérale de la société. Un quotidien de la Capitale, n’a pas hésité à associer une vice-ministre à la promotion canapé. Au-delà de son caractère diffamatoire à bien des égards, l’article met en lumière cette misogynie. Pour la militante Marie Christina Kolo, il s’agit d’un mal qui est profondément inscrit dans la société. « Il y a cette image que pour réussir dans la vie, une femme a besoin d’un homme. Je connais une amie qu’on a accusée de progresser grâce à la promotion canapé », lance Marie Christina Kolo, qui affirme avoir vécu des médisances, du temps où elle travaillait à l’Assemblée nationale. « J’entendais des « comment elle est arrivée là celle-là  ». En plus d’être femme, j’étais jeune et je ne venais pas de la capitale, raconte-t-elle. C’était dur mais c’est à travers les actions, en montrant notre expertise qu’on gagne la confiance des gens. Il faut ignorer les médisances. A force, les gens se fatiguent ».
Pas de solidarité femme-femme
Les femmes doivent en quelque sorte prouver, plus que les hommes, qu’elles méritent leur place. Une jeune cadre dans le privé le confirme. « Dans mon ancien emploi, j’ai vécu cela surtout au début, le temps de se faire une place et d’être considérée. Je travaillais dans le domaine de l’automobile, un monde d’homme à souhait. On remettait à chaque fois en doute mes propos. En fait, je devais prouver à chaque fois que je maîtrisais le sujet. C’était difficile physiquement, mentalement et intellectuellement », indique notre interlocutrice, qui dépeint une situation injuste et rabaissante. « Les gens pensent que les femmes ne peuvent pas avoir un plan de carrière », poursuit-elle.
Les médisances allant dans ce sens sont monnaie courante dans l’administration. Un jeune homme qui travaille dans un ministère affirme que c’est habituel d’entendre ce genre de propos. « Les ragots vont bon train surtout avec les parachutages. Tout le monde y va de son petit commentaire aussi bien les hommes que les femmes », lance-t-il. Marie Christina Kolo déplore le fait que les femmes ne sont pas solidaires entre elles face à cette misogynie. « J’ai pu voir cela à l’Assemblée nationale. Les femmes qui réussissent sont vues comme des concurrentes », se désole-t-elle. Quoi qu’il en soit, tout le monde s’accorde à dire que la corruption sexuelle existe bel et bien. Ce n’est pas la chargée du programme corps-sexe de Transparency International-Initiative Madagascar, Liantsoa Rakotoarivelo, qui dira le contraire. L’association se concentre actuellement sur les cas de corruption sexuelle dans les établissements scolaires et le milieu universitaire. « Il y a des jeunes filles qui, pour passer un niveau, acceptent de sortir avec un professeur. Je ne suis pas étonnée que cela se reproduise en milieu professionnel », indique-t-elle.
Marie Christina Kolo d’ajouter que les femmes n’acceptent pas forcément de gaité de cœur de donner leur corps. « D’un autre côté, si c’est gagnant-gagnant … Le problème c’est que l’attitude de certaines rendent la vie difficile à d’autres qui veulent et qui peuvent s’en sortir toutes seules. Ces dernières doivent parfois sacrifier leur féminité dans leur milieu de travail pour éviter les on-dit ».
Tolotra Andrianalizah