La solidité et la longévité des murs centenaires malgaches ont toujours suscité curiosité et admiration. Perdus dans les forêts de béton, ils sont encore nombreux à affronter les intempéries dans les quartiers de la capitale.
Remise au goût du jour en architecture pour leur côté authentique, la bauge malgache peut constituer une alternative à la hausse des prix des matériaux de construction, selon Miraniaina Andriamalala Anjaramanantenasoa, une docteure en Science des matériaux qui vient de valider son Habilitation à diriger des recherches (HDR) avec le thème « Influences des caractéristiques physiques de la terre crue sur la modélisation et l’analyse du cycle de vie de la bauge pour la construction à Madagascar ».
« J’ai toujours été impressionnée par les murs traditionnels malgaches et leur durabilité, lance cette spécialiste en géotechnique. Jusqu’ici on se demande toujours ce qui les rend si résistants. Naturellement, j’ai axé mes recherches sur les caractéristiques physiques de ces murs ». Miraniaina Andriamalala fait remarquer qu’on continue à faire de la bauge actuellement. Elle déplore toutefois que ce n’est plus aussi résistant. « Même l’aspect n’est pas pareil comparé à ce qui se faisait d’antan. Il y a un savoir-faire qui ne s’est pas transmis », souligne-t-elle.
Nouvelles villes en bauge
Pour les besoins de ses recherches, elle a étudié plusieurs murs traditionnels anciens, de la Haute Matsiatra au Bongolava en passant par Moramanga. « Nous avons vu par exemple un mur qui date de plus de 150 ans à Manandriana », indique-t-elle. Bien que les murs aient été construits à différents endroits, il en est ressorti que les caractéristiques physiques sont presque identiques. Elle a ainsi pu identifier une bauge de référence. « Les recherches consistent à se pencher sur les caractéristiques physiques du sol afin de trouver la bonne formule pour avoir une bonne bauge solide à l’ancienne, peu importe le sol utilisé », explique-t-elle.
Concrètement, il en est ressorti un logiciel baptisé MBM (Modélisation des bauges de Madagascar) qui permet d’ajuster les composants du sol disponible sur un chantier pour aboutir aux caractéristiques physiques des bauges traditionnels, gage de longévité. Miraniaina Andriamalala assure que l’outil est facile à utiliser. Son idée est de faire en sorte que les Malgaches puissent eux-mêmes construire leur habitation. La désormais professeure de l’enseignement supérieur de rappeler que ce matériau est non seulement résistant mais également écologique et surtout bon marché. « La matière première est pratiquement gratuite dans la mesure où la terre est prélevée sur place », précise-t-elle. Miraniaina Andriamalala de souligner que Madagascar a la chance d’avoir une belle palette naturelle de couleur terre. Elle avance l’idée de nouvelles villes entièrement faite de bauge en indiquant qu’il est possible d’en faire une maison à deux étages avec ce matériau.
En général, la bauge est composée de sol limoneux argileux, non gonflant, des matières stabilisantes telles que de la paille, de bouse de vache, des produits servant de colle comme la sève de bananiers, de l’urée et de l’eau.
Tolotra Andrianalizah