Outre le stéréotype de « fanaka malemy » et parfois de maltraitance physique subie en ménage, de nombreuses femmes malgaches endurent également des formes de violences morale et économique, les empêchant de s’épanouir personnellement et professionnellement, selon le maître Narindra Andriamananony.
Même si, en fin 2019, suite à des débats houleux, Madagascar a adopté une loi réprimant les violences fondées sur le genre, à savoir « la violence physique, sexuelle, psychologique et économique exercée au sein de la famille », cette année, 40% des demandes de divorces ont la violence morale et économique pour motif, dans le cabinet de l’avocate, le Maître Narindra Andriamananony.
Selon elle, bien que Madagascar dispose de conventions internationales, notamment de la Convention relative aux droits de la femme et aussi de la Convention sur l’élimination des formes de discrimination à l’égard des femmes, outre la loi 2019-008, relative à la lutte contre les VBG, promulguée le 16 janvier 2020, diverses formes de violence morale, physique et surtout économique limitent les épouses malgaches. En général, elles ne connaissent pas leurs droits d’une part. D’autre part, même en connaissance de cause, elles tergiversent quant au fait d’en jouir.
Ni entreprendre ni travailler
Aina 29 ans, refuse de sortir de chez elle car son mari l’a battue pour « avoir osé consulter des offres d’emploi sur internet ». Tout le voisinage d’Ambatoroka a entendu ses cris et son mari lui proférer des menaces concernant le fait qu’elle se mette à chercher un emploi. Cependant, personne dans leur entourage n’a osé réagir, de peur d’intervenir dans les disputes récurrentes de ce couple. Ne pouvant ni entreprendre ni travailler, le sort de cette épouse semble s’arrêter à être mère au foyer, et à accepter les agressions physique et verbale de son époux, tant qu’elle ne reconnaîtra pas ses droits, ni ne les fera valoir.
Il ne s’agit pas d’un cas isolé. Dans d’autres ménages, comme dans celui de Zarasoa, « les coups et les insultes s’accompagnent de d’humiliation et d’intimidation, en lui martelant que si un recruteur voudrait bien de sa candidature, elle ne gagnerait qu’un salaire de misère ». C’est avec les larmes aux yeux que cette épouse qui, à 5 ans de mariage, n’a jamais osé porter plainte contre son mari, nous confie que « ce serait honteux de divorcer à seulement 30 ans ». Dans ses lamentations, elle se demande « qui voudrait me recruter à mon âge, puisque je n’ai pas d’expérience du tout ».
Des actes punis
Le maître Narindra Andriamananony de rappeler que selon l’article 9- loi 2019-008, relative à la lutte contre des VBG, le fait de ne pas laisser la femme travailler constitue une forme de violence morale. Dans son préambule, la Constitution de la république de Madagascar prône également « l’égalité de tous et le fait que chaque citoyen a le droit d’avoir un travail ».
Les frappes morales envers les femmes peuvent être ancrées et les empêcher d’aller de l’avant pour chercher un emploi, même si elles affirment ressentir les difficultés d’un seul salaire pour faire tourner le foyer, sans compter les formes agressives d’humiliation pour leur rappeler que leur mari est « le chef de famille ». Cette expression stipulée dans l’article 54 de la loi 2007-22, relative au mariage et aux régimes matrimoniaux s’avère, dans de nombreux cas, exploitée par certains hommes pour exercer leur supériorité afin de mieux contrôler leur épouse.
Cependant, l’article 12 de la loi relative à la lutte contre des VBG stipule que « Quiconque aura privé ou restreint son conjoint ou la personne engagée avec lui dans une union, de ses droits liés à l’accès aux ressources financières est puni d’une amende de cent mille Ariary à cinq cents mille Ariary (100.000 à 500.000 ariary) ».
Tant que les femmes garderont leur silence, leurs droits resteront bafoués. « Les quelques braves qui s’aventurent à passer devant le tribunal, dans le cadre d’un divorce, restent vulnérables même si elles sont sûres d’elles lors des procédures de divorce », conclut le maître Narindra Andriamananony. Les sensibilisations sur les VBG envers les femmes restent une manière de les conscientiser sur leurs droits afin qu’elles puissent s’épanouir, personnellement et professionnellement. Néanmoins, en parallèle, de nombreux hommes malgaches œuvrent pour aider leurs épouses dans leur ascension et leur épanouissement professionnels.
Linda Karine