Les appels d’offre dans la construction ne font mention d’aucune exigence dans la traçabilité des matériaux utilisés à propos du travail des enfants. Les carrières de pierre un peu partout dans Madagascar ne désemplissent pourtant pas de mineurs.
Longtemps, l’activité de concassage de pierre a cristallisé le travail des enfants à Madagascar. Force est de constater que le phénomène est toujours d’actualité, éclipsé par moult non-respect de droits humains. Aucune avancée significative n’a été enregistrée au cours de ces dernières années sur ce front confirme une source auprès du Bureau international du travail (BIT). « Le travail des enfants dans le secteur minier est un réel problème. Nous allons entamer un recensement des exploitants de mica l’année prochaine mais rien n’est pour le moment prévu pour les carrières de granite », indique notre interlocuteur.
Aucun suivi
Cette violation des droits des enfants se fait pourtant au vu et au su de tous. Il suffit par exemple de se rendre à Anosiala, Antananarivo ou à Ivoloina, Toamasina pour s’en rendre compte. « Ce sont surtout les femmes qui concassent les pierres. Mais elles se font souvent aider par leurs enfants qui ne vont pas à l’école. Les hommes transportent les gravillons », lance Muriella Ranaivo de Women in Mining and Resources Madagascar Wimr-Mada qui a soulevé la question des carrières de granite en novembre 2020 lors de la Journée des Régions avec sa collègue Angélique Rasolonjatovo. Ayant également participé aux discussions autour de la réforme du code minier, elle souligne justement que la mention de ces carrières dans ledit code est infime. « En réalité, ce sont les communes qui gèrent ces exploitations. De ce fait, il n’y a pratiquement aucun suivi que ce soit au niveau de la sécurité au travail ou au niveau de l’environnement », poursuit-elle. Plus généralement, elle indique que le code minier actuel ne prend pas du tout en compte le travail des enfants ni les conditions des femmes. « Même le décret MECIE (mise en compatibilité des investissements avec l'environnement) ne considère pas à sa juste valeur de volet social. C’est certes compris dans l’EIE (étude d’impact environnemental) mais il faudrait ajouter le S de social », avance-t-elle.
Traçabilité
Les pierres ainsi concassées sont utilisées dans la construction. Les gravillons constituent les matériaux pour les nombreux chantiers dans le pays que ce soit pour le compte de particuliers ou pour le compte de l’Etat. Apparemment, personne ne se soucie de la provenance des gravillons. « Les dossiers standard d’appel d’offres à Madagascar doivent respecter plusieurs points mais rien ne mentionne le travail des enfants », souligne une entrepreneure dans le bâtiment, une lacune confirmée par notre interlocuteur du BIT. « Ce sont des intermédiaires qui achètent les pierres dans les carrières. Des intermédiaires qui vont vendre à d’autres intermédiaires et ainsi de suite », fait savoir Muriella Ranaivo.
Au-delà des mines et des carrières, la lutte contre le travail des enfants et le respect de leurs droits en général se heurte aux dures réalités de la pauvreté du pays. Les cas sont innombrables à Madagascar ne serait-ce que l’embauche de petits garçons et de petites filles comme employé à domicile dans les grandes villes.
Tolotra Andrianalizah