Le taux de syndicalisation à Madagascar est en berne avec moins de 10% des travailleurs syndiqués. En ce jour de 1er mai, il convient de rappeler que la genèse du mouvement syndicale malgache est intimement liée aux luttes indépendantistes du pays.
Les travailleurs malgaches ont lutté pour l’amélioration des conditions de travail bien avant l’indépendance. Le secrétaire générale du Firaisan’ny sendikan’ny mpiasan’i Madagasikara (Fisema) José Randrianasolo et non moins coordonnateur de la Confédération des travailleurs de Madagascar (CTM) évoque notamment les manifestations des travailleurs agricoles dans les plantations de Sainte-Marie en 1920. A cette époque, les manifestations étaient illégales et sévèrement réprimées. Le 23 octobre 1936, les ouvriers au sein de la Société Industrielle et Commerciale de l’Emyrne (SICE) à Soanierana entament une grève pour réclamer une hausse de salaire et notamment la fin des travaux forcés. La grève aboutit à l’adoption du décret du 9 mars 1937 qui autorise la création des syndicats. Bien que le décret restreigne l’exercice du droit syndical aux travailleurs qui savent lire et écrire le français, cette grève est considérée à ce jour comme le point de départ du mouvement syndical à Madagascar. Le droit syndical ne sera reconnu à tous les travailleurs que le 1er aout 1938 et la sortie d’un décret allant dans ce sens.
L’année 1937 a vu la naissance de quatre syndicats à savoir le Syndicat des ouvriers et paysans de Madagascar, dirigé par le Dr Joseph Ravoahangy Andrianavalona, le Syndicat unifié de l’Assistance médicale et des services de santé, dirigé par le Dr Razafindratandra, le Syndicat unifiée de l’agriculture, de l’élevage, des eaux et forêts, sous la direction de Pierre Boiteau et le Syndicat unifié de l’imprimerie officielle créé et dirigé par André Alexandre Guyader. Les quatre syndicats créés formaient l’Union départementale des syndicats des ouvriers et employés de Madagascar (UD), elle-même affiliée à la CGT (Confédération générale du travail) ‐ Unifiée de France.
Empreinte française
L’empreinte française est particulièrement prononcée dans les débuts du mouvement syndical malgache comme l’indique José Randrianasolo. Madagascar était même le théâtre des rivalités syndicales françaises avec l’implantation de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC) pour contrer l’influence de la CGT-U qualifiée de pro-communiste. Entre 1938 et 1942, les deux formations syndicales se sont menée une âpre lutte d’influence pour l’organisation des travailleurs malgaches.
José Randrianasolo explique que malgré les divergences idéologiques, les syndicats malgaches partageaient la lutte pour le retour de l’indépendance de Madagascar en plus de l’amélioration des conditions de travail et de l’exercice du droit syndical. Le professeur François Rajaoson, président de l’Académie malagasy, déclare même que la genèse du syndicalisme malgache fait partie du mouvement de libération de l’île avec des mouvements contre le système colonial et pour l’égalité des droits. La plupart des nationalistes malgaches ont d’ailleurs commencé leur carrière politique dans la direction des syndicats à l’image donc du Dr Joseph Ravoahangy Andrianavalona.
L’un des faits d’arme marquant du mouvement syndicale date de 1957. En novembre 1957, les principales centrales syndicales du pays à savoir la Fisema (anciennement UD-CGDT devenu elle-même Union syndicale-CGT), l’Union des syndicats autonomes de Madagascar (USAM-formation dissidente de l’Union syndicale-CGT) et la Confédération chrétienne des syndicats de Madagascar (CCSM, anciennement CFTC qui deviendra le Sekrima ou Sendika kristianina malagasy) provoquent une grève générale pour la mise en place du système d’allocation familiale et de pension de retraite. Le nouveau Code du travail de 1960 est alors assorti d’un Code de prévoyance sociale. Ces textes seront aménagés en fonction des revendications sociales. La refonte du Code du travail actuelle qui date de 2004 est d’ailleurs en gestation et devrait passer devant les députés lors de la prochaine session parlementaire.
Tolotra Andrianalizah