Les chiffres de la Banque mondiale sur la pauvreté à Madagascar ont été particulièrement attendus. Les auteurs du rapport attirent l’attention sur le bond que la pauvreté urbaine a connu entre 2012 et 2022.
« L’appauvrissement de la population urbaine a entraîné une réduction des inégalités nationales », peut-on lire dans le résumé du rapport de la Banque mondiale sur la pauvreté et l’équité entre 2012 et 2022. « L’écart de bien-être entre les milieux urbain et rural s’est réduit à cause d’une baisse de bien-être urbain pour tous les ménages urbains ». Le rapport indique qu’en 2022, 75,2% des Malgaches vivent sous le seuil de pauvreté national de 4 048 ariary par personne par jour contre 72,9% en 2012. Mais l’essentiel est ailleurs, soulignent les auteurs Ana Maria Oviedo et Francis Mulangu, économistes principaux de la Banque mondiale spécialisés dans la pauvreté. Ils se disent préoccupés par la hausse de la pauvreté urbaine qui est passée de 42,2% en 2012 à 55,5% en 2022. « Nous savions que la COVID-19 a aggravé la pauvreté urbaine avec les pertes d’emploi entre autres mais nous sommes surpris par l’ampleur », indique Francis Mulangu qui souligne que la pauvreté urbaine a donc connu une hausse de 31,5% sur la période. Les conditions de vie en milieu urbain se sont ainsi détériorées en une décennie. Le phénomène est plus marqué dans les villes secondaires passant de 46% à 61%.
Généralisation de la pauvreté
Pour les auteurs du rapport, la pauvreté urbaine est le résultat de la diminution des opportunités économiques, de la détérioration de l’environnement des affaires ainsi que le manque d’investissement dans le capital humain. Pour le responsable des opérations de la Banque mondiale pour Madagascar Atou Seck, la lutte contre la pauvreté dans le pays nécessite une réforme audacieuse en faveur de la croissance qui améliorera le climat des affaires, encouragera la concurrence, renforcera le capital humain, investira dans la connectivité, l’accès à l’énergie et l’infrastructure numérique, et stimulera la productivité agricole. « En mettant en œuvre de telles mesures, Madagascar peut créer un environnement propice à la croissance du secteur privé, à la création d’emplois et à la réduction de la pauvreté, ce qui bénéficiera à l’ensemble de la population », poursuit-il.
La pauvreté rurale quant à elle a légèrement diminué mais reste particulièrement élevé passant de 80,6% en 2012 à 79,9% en 2022. Le rapport souligne une augmentation de la consommation rurale qui a eu pour effet de réduire légèrement l'inégalité rurale. Par ailleurs, les auteurs notent un recul plus significatif de la pauvreté extrême rurale passant de 60,2% à 56,7%. En milieu urbain, la pauvreté extrême a progressé de 22,1% à 31%. Les auteurs soulignent ainsi une augmentation de l’inégalité urbaine avec un recul de la consommation notamment pour les 80% les plus bas.
En somme, la différence entre les milieux urbain et rural est en train de s’estomper, marquant une certaine forme de généralisation de la pauvreté dans le pays.
Tolotra Andrianalizah