Elle s’appelle Fanilo Ny Aina Ramanitrinizaka. Elle a 27 ans. Doctorante à l’Ecole supérieure des sciences agronomiques à Ankatso, elle va représenter Madagascar au concours « Ma thèse en 180 secondes », à Paris en septembre. Elle est de ceux qui comptent se consacrer aux recherches. Interview.
Studio Sifaka : En quoi consiste ce concours ?
Fanilo Ny Aina Ramanitrinizaka : Il y a des doctorants qui présentent leurs thèmes en trois minutes. Les participants doivent faire en sorte que le public comprenne de quoi il s’agit dans des phrases simples. Il faut vraiment que ça passe pour le public. Nous en sommes à la troisième édition à Madagascar. J’ai gagné le concours national et je représenterai le pays en septembre au concours international à Paris. Mon thème porte sur la sélection variétale de riz pluvial.
Votre thèse en 180 mots ?
(Rires) Avant que le riz ne soit mis sur le marché, il faut sélectionner les variétés. Normalement, on fait ça dans une station de recherche. Moi, je travaille au FOFIFA (Centre national de la recherche appliquée au développement rural). Le problème avec ce type de sélection, c’est qu’on utilise beaucoup d’engrais. On fait en sorte que le riz pousse bien. Les agriculteurs n’ont pas autant de possibilité, ni de ressources d’ailleurs. Ils n’ont pas beaucoup d’intrants pour faire pousser le riz, donc les variétés à la station passent mal une fois chez les agriculteurs. Mon thème consiste à ne pas faire de sélection à la station mais directement chez les agriculteurs avec leurs moyens. L’idée est d’utiliser les intrants à la disposition des agriculteurs comme le fumier.
A votre avis, qu’est-ce qui a fait que vous ayez gagné le concours national ? Si vous aviez un conseil à passer pour les autres qui veulent participer, ce serait quoi ?
 Je ne pense pas que j’ai gagné spécialement par rapport au thème parce qu’il y avait d’autres thèmes vraiment plus intéressants. Je pense que c’était par rapport à la façon dont je l’ai présenté. Je trouve que pour les autres c’était trop classique, genre contexte, problématique et tout. En bref, les autres étaient trop techniques. Moi, j’ai essayé une autre approche. J’ai raconté une histoire pour que ce soit clair. Je pense que c’est ce qui a fait pencher la balance en ma faveur.
Après votre thèse, que comptez-vous faire ?
Bonne question (Rires). Déjà , il y a une possibilité que je continue mes travaux de recherche. Je travaille dans un organisme dont c’est l’activité principale donc je pourrais continuer mes recherches dans ce cadre. Il est aussi possible que je trouve un poste à l’université.
Nous avons une fois fait appel aux Chinois pour des variétés de riz. Par rapport à la recherche justement, est-ce que les chercheurs malgaches et leurs recherches ont leur place à Madagascar ?
Je me suis posé la question à un moment donné. Oui, il y a beaucoup de recherches sur le riz par exemple. Il y a des tonnes de bibliographie mais ça n’arrive jamais réellement chez ceux qui sont concernés. C’est pour ça aussi que j’aime mon thème parce qu’il fait le lien entre les chercheurs et les agriculteurs. Je ne peux pas parler au nom des autres mais je pense que ma recherche devrait avoir sa place.
Il y a le SRI et les nouvelles méthodes de production dont on vante à chaque fois les mérites. A votre avis, pourquoi cela ne passe pas chez les agriculteurs ?
Je pense que c’est la technique en elle-même, parce que les agriculteurs ont du mal à adopter quelque chose de nouveau. C’est complètement contradictoire avec ce qu’ils ont l’habitude de faire. Je pense que c’est par rapport à la tradition. Après, il y a des études qui sont en train d’être faites pour analyser le problème. Déjà , les vulgarisations se font dans le cadre de projets. La pratique s’arrête avec les projets. Il y a un problème de continuité à la fin des projets.
Propos recueillis Tolotra Andrianalizah