L’annonce de la distribution d’engrais amélioré au sulfate d’ammonium issu du traitement du nickel et du cobalt d’Ambatovy a fait beaucoup réagir. Lanto Eric Randrianarimalala, membre du Syndicat des ingénieurs agronomes de Madagascar, estime que c’est une bonne chose sous certaines conditions. Interview.
Studio Sifaka : Qu’est-ce que le sulfate d’ammonium ?
Lanto Eric Randrianarimalala : Le sulfate d’ammonium c’est du sel qu’on utilise comme engrais au même titre que le NPK qu’on connait tous. Le sulfate d’ammonium apporte de l’azote et du soufre aux cultures. Cela va permettre d’augmenter le rendement agricole.
Quel sont les risques dans son utilisation ?
Le sulfate d’ammonium agit sur l’acidité du sol. On l’utilise sur des sols calcaires et alcalins. S’il est mal utilisé, c’est vrai qu’il peut perturber la fertilité.
Mais vous soutenez son utilisation …
Oui, je soutiens l’utilisation du sulfate d’ammonium. L’utilisation d’engrais est encore faible à Madagascar. La priorité du pays devrait être l’augmentation du rendement des producteurs. Cela passe entre autres par l’utilisation d’intrants dont l’engrais. Je pense que le fait qu’on produise actuellement du sulfate d’ammonium localement grâce à Ambatovy est une opportunité pour Madagascar car jusqu’ici, nous importons essentiellement nos engrais à l’image de l’urée. Le stock de sulfate d’ammonium d’Amboatovy s’élève à 200 000 tonnes.
Comment éviter ces risques ?
Il y a certains types de sol où l’utilisation du sulfate d’ammonium est recommandée. Il est nécessaire de faire un diagnostic du sol pour définir les besoins. Je pense que les ingénieurs agronomes du ministère ont déjà cartographié les différents types sol à Madagascar. Mais ce qu’il faut c’est un encadrement des producteurs. Il faut ensuite faire un suivi et un contrôle de l’utilisation. Enfin, une évaluation est importante pour mesurer l’impact.
Qu’en est-il du niveau d’accompagnement des producteurs malgaches ?
A mon avis, c’est surtout l’absence de l’Etat qui prévaut. L’Etat n’a visiblement pas les moyens ou n’a pas mis les moyens pour accompagner les producteurs. Cela se ressent dans les zones d’intervention d’ONG. Les appuis s’arrêtent en même temps que le soutien de ces projets.
L’argument du biologique a été soulevé. L’autosuffisance alimentaire va-t-elle de pair avec le biologique ?
Utopique. Produire bio est certes bon pour l’environnement et bon pour la santé mais ce n’est pas du tout efficient. Cela revient très cher de produire bio. Dans les faits, notre production n’arrive pas à satisfaire nos besoins. Comme je l’ai dit, l’utilisation d’engrais est encore très faible dans le pays. Il faut d’abord donner les moyens aux producteurs de produire plus. Le biologique est encore un marché de niche car ce n’est pas à la portée de tout le monde, surtout à Madagascar. Â
Propos recueillis par Tolotra Andrianalizah