L’unité affichée par les Malgaches il y a un an, jour pour jour, durant l’épopée égyptienne des Barea, semble loin. C’était bien une nation qui était derrière l’équipe nationale. Oubliés le temps de quelques semaines les origines, les religions et mêmes les tendances politiques. Mais c’était il y a un an.
Alors que le pays fait face à la covid-19, les Malgaches sont plus désunis que jamais. Les réactions à la suite de l’intervention du Ministre de la Santé Ahmad Ahmad illustrent un mal qui ronge le pays de l’intérieur. Le Ministre a été la cible d’attaques frontales par rapport à sa « non-maîtrise » de la langue officielle. Les réactions ont dégénéré en propos haineux entre les utilisateurs de Facebook.
Pour le général Désiré Ramakavelo, un ministre a tout à fait le droit de s’exprimer dans le dialecte qui lui convient. Il différencie ainsi la langue maternelle de la langue nationale et réfute l’idée d’une langue officielle. « La langue maternelle, c’est la langue avec laquelle une personne a été élevée. Cela peut être du Betsimisaraka ou du Sakalava. La langue nationale, par contre, est la langue utilisée pour communiquer avec les autorités », indique-t-il, en ajoutant qu’il n’y a nul besoin de traducteur à Madagascar.
Eriger une nation
L’historien Hemerson Andrianetrazafy affirme, pour sa part, que ce qui s’est passé sur Facebook ces derniers jours est un faux problème. D’après lui, il s’agit de l’héritage du colonialisme qui ne cesse d’annihiler toutes velléités d’unité des Malgaches. « Il y a une tendance à s’attarder sur les différences. Même à Antananarivo, la façon de parler permet de définir la classe socio-économique », souligne cet enseignant-chercheur qui avance également que peu importe le dialecte, les Malgaches arrivent tout de même à se comprendre. Il estime que pour ériger une nation, il est important d’accepter que chacun a ses origines. « L’idée est de construire l’ensemble et le commun à partir de la singularité et la diversité ».
Concernant le malgache officiel, l’historien rappelle que cela vient du malgache d’Avaradrano utilisé pour la traduction de la Bible. C’est devenu la langue utilisée au niveau de la royauté. « Durant la période de la malgachisation, il y a eu une initiative de faire entrer des mots communs à tous les Malgaches dans cette langue officielle. Mais cela a été abandonné avec la malgachisation », fait savoir Hemerson Andrianetrazafy.