Les pratiques culturelles sont parfois citées comme un obstacle à la conservation de l’environnement. Il y a des cas où c’est la culture qui demande cette conservation. Focus sur le site bioculturel d’Antrema et l’enjeu de l’implication des communautés locales dans la protection de l’environnement.
Antrema, c’est une aire protégée de 20 000 ha qui se trouve sur le littoral nord-ouest de Madagascar du côté de Katsepy, dans la région Boeny. Cette station forestière a obtenu son statut de protection en 2015 et son complexe de zones humides d’un taux d’endémisme de 76% lui a valu d’être un site Ramsar. L’espèce emblématique de ce site qualifié de « bioculturel » est le Propithecus coronatus ou Propithèque couronné couramment appelé Sifaka couronné. Pourquoi le Sifaka et surtout pourquoi bioculturel ?
La réponse se trouve dans le stand du site bioculturel d’Antrema à la Foire internationale de l’économie rurale (FIER-Mada) où l’on peut lire : « un mariage parfait de la culture et de la conservation ». D’après les explications, c’est la communauté Sakalava de la zone qui a demandé à ce que celle-ci soit protégée. En effet, le Sifaka couronné qui vit sur le site a une signification particulière dans la culture les autochtones. Une légende veut qu’un Sifaka ait aidé et soigné un Ampanjaka (prince) qui se serait blessé seul dans la forêt. « Depuis, le Sifaka est toujours associé à notre Ampanjaka », ajoute une femme dans le stand où l’on peut d’ailleurs trouver un photomontage de l’actuel Ampanjaka, le Prince Tsimanendry, devant deux Sifaka. « C’est pour assurer la protection du Sifaka qu’est née l’initiative de faire du site une aire protégée. Le Muséum national d’histoire naturelle assure la cogestion du site avec la communauté dans le respect de la culture Sakalava. D’où le site bioculturel », enchaine une autre responsable du stand.
AGR
Mais pour que la conservation soit couronnée de succès, il a été primordial de fournir à la population les moyens de subsister sans nuire à l’environnement. C’est ainsi que la plateforme Antrema miray (Ami) a été mise en place. Il s’agit d’une plateforme regroupant toutes les associations dans le fokontany. « Nous avons entre autres des associations de pêcheurs, des associations d’artisans ou encore d’agriculteurs. Ces associations sont présentes dans les huit hameaux qui constituent le fokontany », poursuit la responsable. D’après elle, les villageois ont fait mieux que subsister. « Pour preuve, les villages doivent leur électricité aux efforts de l’association d’apiculteurs, par exemple ». Le site bioculturel d’Antrema est par ailleurs un habitué de la FIER-Mada. Une visiteuse indique acheter du gros sel sur leur stand chaque année.
Les activités génératrices de revenus pour les communautés locales constituent le nerf de la guerre de la conservation des aires protégées. Ce ne seront ni Durrell Madagascar ni Madagascar national parks qui diront le contraire. « Quand les communautés locales sont dans le besoin, elles aident plus dans la conservation. Nous menons des projets de développement dans le cadre de la conservation. Nous appuyons les communautés dans les activités génératrices de revenus », indique-t-on chez Durrell qui déclare avoir observé une baisse de 60 à 75% de la pression sur l’environnement, une pression constituée essentiellement de feux de brousse et de trafic. Pour sa part, Madagascar national parks est représenté à la FIER-Mada à travers les communautés villageoises des parcs nationaux d’Ankarafantsika et de Marolambo.Â
Tolotra Andrianalizah