On le connaît pour ses mèmes sur Facebook où il transcrit à travers son humour décalé les actualités du pays. Mais au-delà de cette désinvolture assumée, se trouve un jeune homme engagé dans la citoyenneté active à travers ses diverses responsabilités notamment au sein de l’ONG Tolotsoa. Voici Tsimihipa Andriamazavarivo. Portrait. Â
Un prénom peut-il avoir un impact sur un être humain ? Il semble que c’est le cas pour Tsimihipa Andriamazavarivo, coordinateur de l’ONG Tolotsoa. En traduction libre, ce terme signifie « inébranlable » d’après sa mère. « C’est le prénom de mon grand-père. Chez nous à Vangaindrano, cela veut dire quelqu’un qui se bat pour ses idées, explique-t-elle. Je suis à 100% fière de lui. Il est devenu ce que j’avais pensé qu’il serait : un combattant ». Le militantisme a visiblement accompagné Tsimihipa Andriamazavarivo toute sa vie. Même avant. « Ma naissance a empêché ma mère de marcher sur Iavoloha en 91. Mais elle m’a emmené sur la place du 13 mai en 2002. Puis j’ai passé le bac en 2009 avec comme fond la révolution orange », se plait-il à raconter.
Citoyenneté active
Tsimihipa Andriamazavarivo, 30 ans, est une figure montante de la société civile. Il faut dire qu’il ne passe pas inaperçu avec sa coupe afro parfois agrémenté de locks. Mais derrière cette dégaine désinvolte se cache un jeune homme mû par des convictions profondes, comme le confirme un de ses collègues Ricard Andrianamanana. « C’est un homme de convictions. Il croit vraiment en ce pourquoi il lutte », souligne son compère chez Tolotsoa. « Mon combat, pour faire court, c'est que la transparence et l'accès à l'information puissent nous muer en citoyens », explique Tsimihipa Andriamazavarivo. La citation d’Alfred Sauvy, « bien informés, les hommes sont des citoyens. Mal informés, ils ne sont que des sujets », résume le fond de sa pensée. Pour lui, être citoyen c’est « se sentir concerné par ce qui s'y passe et se soucier du devenir de ses concitoyens notamment ceux qui sont le plus à plaindre ». « Et la citoyenneté active c'est, en plus le fait de ne pas être indifférent, se battre et chercher des moyens d'y faire quelque chose », ajoute-t-il.
Tsimihipa Andriamazavarivo a fait économie gestion à l’Université Catholique de Madagascar. « J'étais parti pour avoir un parcours tout ce qu'il y a de plus normal dans le secteur privé. Mais la citoyenneté active l'a emporté au final », raconte-t-il. Il indique avoir d’abord trouvé goût à revenir sur les faits historiques et l’histoire politique de Madagascar durant ses années universitaires à travers les ouvrages du Père Sylvain Urfer. C’est l’ouvrage « L’espoir et le doute » qu’il a trouvé dans la bibliothèque de son grand-père à Vangaindrano qui l’a particulièrement marqué. « Le fait est qu'après avoir vu tant de choses et au final peu ou pas de changements, on finit par apprendre dans la douleur qu'au final les gens passent et se succèdent mais rien ne change vraiment », lance-t-il.
Relève
Tsimihipa Andriamazavarivo est décrit comme un gars sérieux dans ce qu’il fait. Le même adjectif revient sur les lèvres des personnes qu’ils côtoient. « Cela se sent dans l’organisation de nos activités », atteste Ricard Andrianamanana. La secrétaire exécutive du Collectif des Citoyens et des Organisations Citoyennes (CCOC) Hony Radert le définit comme un « jeune engagé sérieux ». On semble loin du gars qui publie des mèmes sur Facebook à tout va. Sa mère parle d’une double personnalité qu’il a, entre ce côté sérieux à toute épreuve et ce sens de l’humour débridé. Il convient toutefois de noter que les mèmes qu’il publie sont lié aux actualités. Tsimihipa Andriamazavarivo raconte que cela lui est venu avec le confinement et le phénomène Trump qui d’après lui a fait grimper l’usage des mèmes dans le domaine politique. « Avec le confinement, j'ai eu du temps à revendre et au lieu de juste partager, je les ai faits moi-même », indique-t-il. Au fil du temps, les mèmes sont devenus la marque de fabrique du jeune homme. Pour Hony Radert, les mèmes constituent sa signature.
Avec des jeunes comme Tsimihipa Andriamazavarivo, la société civile peut se targuer d’avoir une relève. « C’est une source d’espoir. Il y a vraiment des jeunes qui s’engagent. Le nombre n’est pas encore suffisant, mais c’est plus qu’avant, se réjouit Hony Radert. Ils viennent avec des idées, des convictions, des bagages pour enrichir le débat. Je peux citer entre autres les Hery Rason, les Marie Christina Kolo. Cette génération est prête à prendre le flambeau. Ils sont présents avec nous sur la scène dans tous les engagements. A eux d’accompagner les jeunes de 20 ans aujourd’hui à prendre la relève. Leur relève ».
Tolotra Andrianalizah