Chaque année, la saison des feux de brousse précède la saison des pluies, et ce sont plusieurs  hectares de forêts qui partent en fumée.
Quoiqu’on dise ou qu’on ait pu dire à propos du tavy ou la culture sur brûlis, la pratique est encore d’actualité et semble n’avoir jamais faibli, surtout dans la partie Est de l’île. Les forêts calcinées visibles depuis la RN2 en sont les stigmates, sans compter les collines dénudées à perte de vue. Le défi a toujours été de taille, aussi bien pour le gouvernement que pour les activistes de l’environnement. Le tavy est solidement ancré dans la population vivant à la lisière des forêts.
Des feux qui empêchent la pluie
Les malgaches qui en font sont-ils des ennemis de la nation ? Pour un citadin sans aucune fibre rurale, le spectacle qu’offre une perle de feu fendant le noir opaque de la nuit est triste et surtout révoltant. « Quel genre d’êtres humains peuvent faire des choses pareilles ? Ce sont ces feux qui empêchent la pluie. Pourtant ils continuent toujours de tout brûler ». Des propos qu’on entend souvent dans un taxi brousse rempli de passagers souvent désarmés devant les flammes qui dansent. Ce seraient donc des ignares butés qui brûleraient la forêt. Pourtant, une directrice d’école primaire publique, très respectée dans un des innombrables villages qui bordent la RN2, en fait sur son lopin de terre dans la forêt. La vision est, en effet, tout autre chez cette partie des Malgaches qu’on pointe trop facilement du doigt. « Nous brûlons pour pouvoir cultiver, lance un jeune homme, qui vit à Andasibe. Il n’y a pas beaucoup de terrains ici. Sans le tavy, je pense qu’il y aurait le kere (famine) comme dans le sud ».
Préservation contre subsistance
La préservation des forêts entre clairement en concurrence avec la subsistance des personnes qui vivent aux alentours. Les paroles de la chanson de Samoela « Hihira indray » en disent long sur cette dualité, lorsqu’il avance « Jereo Zanahary, ireto dimby sy fara, Mba ahita ny sahaza sy anjara, tsy sanatria n'izany ireto gidro sy ny ala, Ireo ndray no tsara karakara ». Le chanteur attire l’attention sur la protection des lémuriens aux dépens des êtres humains. Le cas de la réserve spéciale d’Analalava, Foulpointe, en est un exemple. Un guide indique que le personnel du parc se frictionne souvent avec les riverains qui ne font pas partie de l’association villageoise qui travaille avec la réserve. « Ils disent souvent qu’ils n’ont rien à gagner en faisant de la préservation », souligne le guide, qui déplore que le tavy se poursuit toujours dans les forêts avoisinant le parc. « Nous ne pouvons interdire les feux en dehors de l’aire protégée », soupire-t-il. Un chef secteur à Andasibe fustige, de son côté, une tendance à l’assistanat des villageois et de la solution de facilité que constitue le tavy. « Les gens sont incapables de se prendre en main », lance-t-il.
Zo Andrianina, de Vohitra Environnement, précise pour sa part que pour lutter efficacement contre le tavy, il faut apporter une alternative viable. « Cela passe par la mise en place d’activités génératrices de revenus et d’un accompagnement technique », souligne-t-il. Intégrer les moyens de subsistance des populations autour des forêts serait le principal défi. La récurrence de la saison des feux de brousse, chaque année, montre que les programmes successifs ont failli à ce sujet.